J-1 New York – « Nice shoes, man ! »
Je me souviendrai longtemps de mon arrivée à New York ce mardi. Une tempête de neige paralyse toute la région et provoque la chaos dans les aéroports et sur les routes. Près de 5 heures pour rejoindre Manhattan, alors qu’il faut en général 45 minutes. J’arrive fatigué à l’hôtel tout proche de Times Square. Je retrouve Jacques Muyal, le producteur qui a organisé la session d’enregistrement que je suis venu filmer. Fin d’une journée bien remplie.
Le lendemain, je me réveille très tôt. L’air est glaciale, car si la neige a cessé, un fort vent s’engouffre entre les avenues de Manhattan, transformant chaque sortie en expédition polaire. Après mon arrivée de la veille dans les rues enneigées, un constat s’impose: je dois changer de chaussures. Je trouve donc mon bonheur dans un magasin à quelques rues de l’hôtel. Des bottines en cuir noir avec une semelle orange. A ce moment-là, je ne connais pas encore la portée de cet achat.
Je retrouve Jacques Muyal en fin de matinée, direction Penn Station pour prendre le train qui va nous conduire dans le New Jersey. La ville où l’on nous attend s’appelle South Orange. Ca ne s’invente pas. On se retrouve chez John Lee, un des derniers bassistes de Dizzy Gillespie. Sa maison est transformée en studio d’enregistrement pour l’occasion. Des câbles parcourent tous les étages, des pieds de micros sont disposées minutieusement et les répétitions commencent.
Jacques Muyal fait les présentations, et je suis d’emblée remarqué par l’un d’entre eux: « Nice shoes, man. » Mon achat du matin fait forte impression.
Il y a là Roberta Gambarini, qui pour ce projet de disque, a écrit spécialement des paroles pour les chanter sur des compositions de Jimmy Heath. « Tootie » Heath, le plus jeune des frères Heath, immense batteur, qui entre deux morceaux, raconte à qui passe devant lui ses anecdotes de musiciens. Et bien entendu Jimmy Heath, du haut de ses 87 ans dégageant une énergie incroyable.
Premières prises de contact, premières images. Je me fais discret pour ne pas gêner les répétitions et alterne photos et prises de vues. Larry, le tour manager de Roberta Gambarini, prend les commandes pour la livraison de « chinese food » entre deux morceaux.
Vers 18h30, fin de session avant le repas et nouvelle occasion pour « Tootie », le batteur, de partager quelques anecdotes. Alors que je suis en train de filmer, il s’arrête, me regarde droit dans les yeux et s’exclame hilare: « Nice shoes, man ».